Théâtre du Grand Rond
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L'anniversaire


© Eric Batbedat et Frederick Diot
Compagnie : Modula Medulla,
De : Harold Pinter,
Mise en scène : Jérôme Thibault, Gaëlle Levallois, Regard extérieur : Hélène Dedryvère
Avec : Mallory Casas, Jérôme Thibault, Gaëlle Levallois,

Représentation(s) :

du 8 au 12 mars 2016 à 21h
Genre : happy birthday… vraiment ? / durée : 1h45


Stanley vivote gentiment dans une pension de famille en bord de mer. Unique résident choyé par Meg, maternelle maîtresse de la maison, le jeune homme traîne son ennui et vogue dans une existence un peu débraillée, parfois relevée de quelques sautes d’humeur et siestes câlines. « Il a été pianiste de bar, a voyagé de par le monde et se repose un peu… », dit-il. Arrivent deux clients étranges : Goldberg et Mc Cann, qui imposent une fête d’anniversaire pour Stanley qui nie que ce soit le sien. Qui sont ces deux clients ? Des bourreaux désœuvrés ou des tueurs en service commandé ?

Entre Beckett et Kafka, Harold Pinter crée, avec L’Anniversaire, un genre à part entière : le théâtre de la menace. La menace c’est insidieux, cela se propage, gangrène le quotidien, transforme en peur le moindre silence. Elle part toujours du rire, de la comédie. Puis la comédie vire au noir, le rire au jaune, et le silence arrive. Comme le dit le metteur en scène Claude Mouréras « Chez Pinter il vaut mieux rire au début car à la fin ça se gâte ». La version de la Compagnie Modula Medulla (à qui l’on doit également le remarqué Portrait en pied de Suzanne) est une version virtuose qui porte cette idée de menace à son paroxysme. Ils sont trois à jouer l’ensemble des rôles, les rapports entre comédiens font dangereusement écho aux rapports de Stanley avec Goldberg et Mc Cann, le rire franc et potache du début se déglingue sans que l’on n’y prenne garde et l’on se retrouve au cœur d’une intrigue dont on ne comprend pas le nœud. Comme au milieu d’un interrogatoire d’une quelconque police secrète.
Hypnotisant.
 

L'Arche Éditeur est éditeur et agent théâtral du texte représenté.

 


 

L’Anniversaire, par Claude Mouriéras (extrait du dossier de la comédie Française)

Faut-il en rire ?

Chez Pinter il vaut mieux rire au début car à la fin en général ça se gâte.

Comme le dit Goldberg à McCann, au début du premier acte : « Détends-toi, prends des vacances, offre-toi ce plaisir. » Ce théâtre de la menace, qui caractérise la plupart des pièces de Pinter, s’ouvre sur de la détente, sur ces vies toutes simples faites d’habitudes et de petits compromis si quotidiens et si drôles. On rit de ces répliques qui tombent à plat, de ces vies absurdes et tellement humaines. Même les bourreaux sont drôlement humains, eux aussi ont leurs fragilités, leurs doutes, eux aussi rêvent de vacances… comme nous. « On oublie parfois que les tortionnaires s’ennuient très facilement », nous rappelle Pinter. Alors, tout le monde essaye de se distraire, on rit… puis, au fil de la pièce, on rit un peu moins pour finalement regretter d’avoir ri. Car derrière cette comédie féroce, typiquement anglaise, très enlevée, on est confronté à la délation, à l’enfermement et à la torture. C’est un thème récurrent dans l’œuvre de Pinter, l’image de l’Homme bâillonné, aveuglé, humilié est annonciatrice des images des prisons d’Abu Ghraib  : que ce soit dans les geôles des régimes totalitaires ou dans les prisons aseptisées des régimes démocratiques, Pinter nous oblige à regarder cet Homme nu, bâillonné, soumis.

Mais il va plus loin, il sème le doute pour que nous nous reconnaissions non seulement dans cet homme qui souffre, mais aussi dans le bourreau ou dans le témoin qui est peut-être le dénonciateur. Pinter n’a que faire d’une morale où le bien et le mal seraient facilement discernables, reprenant à son compte cette phrase de Beckett : « Là où nous avons à la fois l’obscurité et la lumière, nous avons aussi l’inexplicable. » La victime a sa part de médiocrité et le bourreau sa part de fragilité. Ce ne sont pas les régimes totalitaires facilement condamnables qui intéressent Pinter, c’est le bourreau qui habite chacun des citoyens du monde libre. Il s’intéresse à ce qui dans nos démocraties peut basculer vers le totalitarisme. Le mal est ici, en nous, il suffit de se regarder attentivement dans un miroir.





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